LE TÉLÉTRAVAIL SURVIVRA-T-IL À L’ÉTÉ ?
Depuis plus d’un an, le télétravail fait partie intégrante de la vie de nombreux travailleurs. Avant la crise du coronavirus, certains avaient déjà accès au télétravail structurel dans leur entreprise (encadré par la CCT 85) ou au télétravail occasionnel (accessible en cas de force majeure ou pour des raisons personnelles clairement définies). Pour d’autres, le travail à domicile a été instauré par la force des choses suite au(x) confinement(s) et aux décisions gouvernementales liés à la crise sanitaire. Dans tous les cas, pour l’ensemble des travailleurs, cette situation de télétravail prolongé est inédite. Avec la vaccination qui poursuit son cours, l’évolution positive des chiffres de contamination et l’assouplissement des mesures sanitaires, on peut espérer un retour à un semblant de normalité après cet été 2021. Le télétravail survivra-t-il à l’été et dans quelles conditions ? Quels pièges éviter ?
La reprise de septembre
Lors de la reprise de septembre, il faut s’attendre à un nouvel épisode en matière de télétravail.
Si tous les signaux sont au vert, celui-ci ne devrait en effet plus être « obligatoire » pour l’ensemble des travailleurs dont la fonction permet de travailler à domicile. On retournerait alors vers du télétravail « occasionnel » ou du télétravail « régulier », une forme de télétravail qui n’existe pas encore dans la pratique ni dans la législation.
Depuis janvier 2021, c’est la CCT 149 concernant le télétravail recommandé ou obligatoire en raison de la crise du coronavirus qui est d’application. Il s’agit d’une CCT temporaire, qui a été instaurée face à l’urgence sanitaire et qui concerne exclusivement le télétravail dans le cadre de la lutte contre le covid-19. Cette CCT spéciale cessera ses effets le 31 décembre 2021. Ni la CCT
85, ni la Loi Peeters (qui règlemente le télétravail occasionnel) ne pouvaient s’appliquer dans le contexte que nous connaissons. De nombreuses entreprises ne possédaient en effet aucune réglementation lorsque le télétravail est devenu obligatoire. On peut d’ailleurs regretter que la CCT 149 reste également lettre morte dans de nombreuses entreprises.
A la rentrée, la question de l’évolution du télétravail « obligatoire » vers le télétravail « régulier » sera sur la table. A ce jour, il n’existe pas d’encadrement interprofessionnel pour ce nouveau type de télétravail et nous ne savons pas exactement dans quel timing celui-ci pourra être acté.
Dans ce contexte, dans un premier temps, ce sera aux délégations syndicales de négocier un encadrement à ce niveau dans les entreprises. Il va sans dire que nous privilégierons toujours de négocier un encadrement interprofessionnel, à défaut un encadrement sectoriel et en dernier lieu, à défaut d’autre chose, un encadrement collectif en entreprise via CCT. Nous disons via CCT parce que dans de trop nombreuses entreprises, on veut avancer sur des policy au même titre que pour une policy pour les voitures. Les délégués joueront donc un rôle crucial dans l’élaboration d’une CCT. La CCT 85 peut servir de guide, elle détaille en effet utilement les devoirs et obligations de chacun. . Dans les faits, de nombreux aspects devront être pris en compte lors des discussions en la matière.
Cette situation de télétravail prolongé a en effet confirmé certains points positifs du télétravail (meilleur équilibre vie privée/vie professionnelle, gain de temps en déplacements, etc.) mais aussi révélé certaines dérives ou mauvais côtés du travail à domicile (droit à la déconnexion difficile, durée de travail prolongée, etc.). Ces avantages et désavantages du télétravail (et la manière dont les travailleurs l’ont vécu) ressortent d’ailleurs fortement des deux enquêtes réalisées par le SETCa sur le sujet.
Il faudra compter à l’avenir avec le télétravail, c’est une certitude ! Mais il est nécessaire d’être attentif à certains points bien spécifiques. Nous conseillons à nos délégués dans les entreprises de discuter de tous ces aspects et de les encadrer à travers la concertation sociale.
La check-list des points dont il faut tenir compte pour un bon encadrement du télétravail
- Lieu du télétravail
Important de le préciser en cas d’accident du travail.
- Fréquence du télétravail et le fait que celui-ci se fasse sur base volontaire
Le télétravailleur doit toujours avoir la possibilité de revenir au bureau.
- Horaires en télétravail
Indiquer les plages horaires et penser également aux règles en matière d’heures supplémentaires. En effet, il ne faudrait pas glisser vers des systèmes où le temps de travail ne serait plus mesuré et où ce serait le nombre de tâches effectuées ou d’objectifs atteints qui déterminerait votre rémunération.
- Disponibilité et accessibilité du travailleur
Dans les limites des plages horaires et via quel canal : messagerie, téléphone ? Il faut également veiller au droit à la déconnexion et au respect de la vie privée.
- Contrôle par l’employeur
Si contrôle il y a, celui-ci doit se faire dans le respect de la vie privée du travailleur. Il faut également indiquer clairement de quelle manière ce contrôle a lieu (résultats etc.). En lien avec le mesurage du temps de travail.
- Rémunération
Le salaire et les avantages extra-légaux doivent être identiques tant en télétravail qu’en présentiel.
- Remboursement des frais inhérents au télétravail
Par exemple, une indemnité forfaitaire par mois. Il faudra préciser également ce qu’il en est pour les travailleurs à temps partiels.
- Dédommagement financier
S’il n’y a plus d’intervention dans les frais de déplacements, un dédommagement lié aux frais domestiques doit être mis en place.
- Mise à disposition de matériel
Indiquer si le travailleur utilise son propre matériel ou celui mis à disposition par l’employeur. Si le travailleur utilise son PC et sa connexion privée, il faut prévoir un remboursement des frais par l’employeur.
- Support technique
Un support technique au télétravailleur doit être mis en place.
- Politique de bien-être
L’employeur doit prendre les mesures appropriées en matière d’ergonomie et sur le plan psychosocial (éviter l’isolement, entretenir le contact avec les collègues…). Les coordonnées du médecin du travail, de la personne de confiance doivent être partagées.
- Égalité de traitement
Droit à la formation, de se faire assister par les délégués syndicaux, charge de travail identique.
Il s’agit là de points dont il faudra tenir compte pour pouvoir négocier le meilleur encadrement possible du télétravail. Les discussions ont déjà démarré dans certaines entreprises, dans d’autres, on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’elles démarrent en septembre, dès le moment où le télétravail ne sera plus obligatoire. D’ici là, le SETCa mettra à disposition des délégués une brochure spéciale sur le sujet : un outil avec des informations très complètes sur tous ces aspects, qui leur permettra d’être armés au mieux pour encadrer le télétravail régulier dans leurs entreprises respectives. Gardez donc à l’oeil notre site web et notre newsletter.
Le télétravail fera encore partie de nos vies demain. Nous ferons en sorte de vous informer au mieux à ce sujet et de défendre – comme nous l’avons toujours fait et continuerons à le faire – vos droits et vos intérêts !