Nouvelle cible…les malades de longue durée

L’exemple des caissières Cora qui auront travaillé à temps partiel plus de 30 ans est assez éloquent. En fait, ce n’est pas une erreur de jugement, c’est du dogmatisme ultralibéral, faire des économies sur la sécu pour donner plus aux employeurs, aux actionnaires et à la guerre.

L’ultralibéralisme, la droite extrême c’est aussi de dire qu’il faut limiter les allocations familiales à x enfants ou que les chômeurs qui ont une maison au Maroc seraient des profiteurs. N’y voyez évidemment aucune stigmatisation…

Petit rappel, pour les politiques peu rompus aux mécanismes de la sécu : pour le CPAS, régime d’assistance, on vérifie vos revenus et patrimoine, ce n’est pas un régime où vous cotisez, c’est une assistance, le dernier filet de sécurité d’un pays qui veut garder une certaine dignité à tous quelles que soit les circonstances de la vie.

L’assurance-chômage, c’est une assurance, c’est-à-dire que cela couvre un risque, celui de perdre votre emploi. Vous cotisez, en cas de survenance du risque, c’est-à-dire la perte de votre emploi, vous recevez votre allocation de chômage, que vous ayez un palais à Monaco ou une maison au Maroc, tout le monde s’en fout, vous avez ouvert ce droit par votre travail. C’est comme pour l’assurance incendie…

Il en restera toujours bien quelque chose de favorable à l’image de ces chevaliers « blancs ».

Aujourd’hui, la cible, ce sont les malades.

Quand on lit les interviews de David Clarinval, à propos des malades de longue durée, cette personne ne se soucie pas du tout de savoir pourquoi les gens sont malades, mais préfère penser que ces gens sont des profiteurs de l’assurance maladie. Il faut prendre des mesures choc, selon le gouvernement Arizona, ce serait cela, le courage en politique. Oser ce que les autres n’ont pas osé… Un jour il faudra bien qu’ils se demandent pourquoi les autres ne l’ont pas fait, parce que simplement ces mesures ne sont pas les bonnes. Oui, elles rapporteront du fric mais elles ne feront qu’accroitre les problèmes de la population !

Soyons de bon compte, et tordons le cou à certains canards boiteux.

Il est évident que le nombre de malades de longue durée explose ces dernières années. Cela dit, pas que chez les salariés, mais aussi chez les indépendants.

Par contre, la stigmatisation ne vise que les salariés.

Si le nombre de malades de longue durée augmente, il augmente singulièrement plus fort et plus vite depuis les réformes sur les pensions (augmentation de l’âge de la pension légale), sur les régimes de fin de carrière, c’est-à-dire de durcissement des conditions d’accès aux RCC et aux crédit-temps mi-temps et quatre cinquième temps fin de carrière, dits « emplois d’atterrissage » ou encore depuis que les régimes relatifs aux métiers pénibles ont disparu.

Des statistiques très claires existent sur le sujet, plus le nombre de RCC, diminue plus le nombre de malades de longue durée augmente de manière quasi symétrique.

Que faut-il penser de cela, les malades seraient-ils devenus des fainéants, des profiteurs ?

Doit-on penser que les régimes de fin de carrière, de pension, les régimes spécifiques pour des métiers pénibles n’ont jamais servi à rien ?

Si l’espérance de vie est plus longue (on peut se poser la question de savoir combien de temps cela va encore durer), il n’en va pas déjà plus de même pour l’espérance de vie en bonne santé !

Si ces systèmes de fin de carrière existaient, c’était pour permettre à des personnes plus âgées, avec des restrictions médicales par exemple, ou qui avaient besoin de souffler, de partir et de connaître une prépension, une pension anticipée ou simplement une pension plus agréable.

Dans le même temps, ces périodes étaient assimilées pour le calcul de la pension et permettaient de faire entrer sur le marché du travail les plus jeunes avec des contrats de qualité. Le cycle de la vie au travail, en d’autres termes.

Pourquoi ? L’indemnité maladie est plus élevée donc pour la sécurité sociale, il est préférable d’avoir quelqu’un avec un régime de fin de carrière prépensionné ou crédit temps plutôt que d’avoir quelqu’un malade de longue durée. Sur le complément RCC versé par l’employeur des cotisations ONSS sont prélevées, ce qui finance la sécu.

Les seuls gagnants dans la partie, ce sont les employeurs, le fait d’avoir des malades de longue durée en fin de carrière leur permet d’éliminer leurs plus gros salaires en les mettant en charge de la sécurité sociale. Ces travailleurs ne coûtent plus.

Par contre en cas de prépension, l’employeur verse un complément aux allocations de chômage (ce complément est soumis à cotisations de sécurité sociale, ce qui alimente donc les caisses…). En cas de maladie, l’employeur va économiser tout complément, donc tout bénéfice.

Au cas où un parcours de réintégration démontrerait que la personne ne peut plus occuper son poste, la législation permet de virer ce travailleur sans indemnité de rupture et donc d’épargner la totalité d’un passif social quelques fois long de plusieurs décennies de travail.

Ça, c’est le jackpot pour l’employeur, la force majeure médicale, le licenciement gratuit !

Quand on vous dit que le fait de supprimer les régimes de fin de carrière, c’est du dogmatisme ultralibéral qui sert les patrons et certainement pas l’intérêt de travailleurs ou leur bien-être.

Sauvegarder le système des prépensions, permet d’assurer des remplacements via des contrats de travail pérennes (obligation de remplacement), quand les travailleurs en incapacité de travail ne doivent pas être remplacés et quand ils le sont c’est le plus souvent par des contrats précaires. Le gouvernement Arizona est intéressé d’augmenter le taux d’emploi quand cela l’intéresse.

Ce n’est que la réalité, les seuls profiteurs de la maladie de longue durée, ce sont les employeurs qui n’ont plus rien à débourser et qui peuvent licencier à très bon marché en cas de force majeure médicale.

Des carrières toujours plus longues, toujours plus précaires, c’est une usine à malades de longue durée. Pas des profiteurs, des malades ! Parce que usés par le travail, par la précarité des contrats, par la peur du lendemain, par la flexibilité toujours plus grande, par une conciliation vie privée – vie professionnelle impossible à gérer ! Ça, c’est la réalité des malades de longue durée. Ce que nous prépare le Gouvernement sur l’annualisation du temps de travail, les heures supplémentaires, la dérégulation toujours plus grande de la relation de travail, la précarisation toujours plus grande, ne fera que renforcer le nombre de personnes épuisées au travail. Ce ne sont pas des malades imaginaires dont on parle, mais de gens que le travail a usé !

Quand parle-t-on de prévention ? Quand parle-t-on de bien-être au travail ?

Quand parle-t-on d’assimilation de crédit-temps fin de carrière pour la pension ?

Quand parle-t-on de dignité pour les fins de carrière, quand parle-t-on d’emploi pour les jeunes, des vrais emplois, pas de jobs étudiants…

C’est ça, les questions que vous devez vous poser au Gouvernement Arizona et pas savoir qui sont les profiteurs. Les profiteurs, c’est clair, ce sont les employeurs qui épargnent le cout des prépensions, des indemnités de rupture et qui exploiteront de plus en plus la misère humaine grâce à vous.

Vous pensez que nous, les syndicalistes, nous sommes restés coincés dans les années 80, c’est bien montrer votre ignorance du terrain !